Dans cet espace, tout respire la passion du métier. Chez Lucie, rien n’est laissé au hasard. Chaque détail compte, chaque geste vise juste. Elle ne parle pas seulement de menuiserie, elle parle de lien, de confiance, de précision. Elle aime la matière autant que les gens. Son parcours est à l’image de ce qu’elle défend : solide, patiemment affûté, et profondément humain.
Née dans une famille d’artisans, elle grandit dans l’odeur du bois fraîchement scié. Son père, fondateur de la Menuiserie Fougerais en 1988, lui transmet bien plus qu’un outil de travail : une exigence, une culture du geste précis, une fierté de faire juste. Lucie, encore adolescente, s’empare très tôt d’un crayon, d’une idée, d’un espace à penser. Elle dessine, observe, imagine, conçoit. Elle se projette déjà dans un métier où l’on transforme l’idée en matière, où l’on fait naître le projet avec rigueur et sensibilité. Alors elle choisit un bac pro menuiserie-agencement. Une orientation qui, à l’époque, ne coule pas de source pour une jeune femme.
Les premières marches sont raides, et les refus s'accumulent. Lucie postule dans de nombreuses entreprises, sans succès. Pas parce qu’elle manque de compétences, mais parce qu’elle ose sortir des cadres : une jeune femme dans la menuiserie n’est pas courant. Pourtant, elle tient bon. Elle ne veut pas qu’on lui ouvre les portes par complaisance, encore moins parce qu’elle est "la fille de". Elle veut prouver par elle-même, à force de travail, de persévérance, de précision. Alors elle choisit la voie du concret, celle des ateliers, des chantiers, des débuts de journée au bruit des machines et des gestes répétés. Elle apprend le métier par les gestes, sur le terrain, mètre après mètre, projet après projet. Dès ses 18 ans, elle est sur le terrain. Pose, fabrication, dépannage : elle affine son geste, son oeil et sa posture. Elle apprend à écouter la matière, à en révéler la justesse. Elle devient une technicienne complète. Escaliers, placards, cuisines, bardages, agencements... Lucie est à tous les postes, avec la même rigueur.
La reprise de l’entreprise ne relève pas du hasard : c’est un projet qu’elle mûrit depuis longtemps. Depuis trois ans, Lucie travaille comme salariée au sein de la menuiserie. Elle prend le temps d’observer, de comprendre, de s’approprier l’environnement et ses mécanismes. Cette immersion progressive, épaulée mais autonome, lui permet de se familiariser en profondeur avec les réalités du terrain et de l’équipe. “Je me souviens très bien du jour où j’ai su que j’étais prête à reprendre. Ce n’était pas un grand discours, ni un déclic spectaculaire. C’était un matin comme les autres, dans l’atelier. J’ai vu l’équipe à l’oeuvre, les dossiers sur la table, les décisions à prendre… et je me suis dit : 'Ca y est, je suis prête !”, confie Lucie.
En février 2024, elle officialise la reprise après son passage en comité d’agrément Initiative Mayenne. Elle se sent prête, sereine, confiante. Forte de cette expérience construite au fil des mois, elle insuffle un souffle nouveau, une dynamique plus collaborative, une attention accrue aux détails comme aux personnes. Elle ne cherche pas à reproduire l’existant : elle ajuste, affine, repense avec subtilité. “Pour moi, une entreprise fonctionne bien quand la satisfaction se construit dans les deux sens : celle du client, bien sûr, mais aussi celle de l’équipe. Je veux que chacun trouve du sens dans ce qu’il fait, qu’il se sente utile et reconnu. C’est cette énergie collective, cette implication partagée, qui garantit la qualité finale. Un bon service, ça commence par une équipe écoutée, responsabilisée, engagée. Quand l’équipe fonctionne avec cohérence et engagement, le client le ressent à chaque étape : dans l’écoute au premier rendez-vous, dans la précision du geste sur le chantier, et dans le soin apporté au suivi. »
La transmission, chez elle, ne se décrète pas, elle se vit. Avec ses collaborateurs expérimentés parmi lesquels on compte 4 femmes dont une apprentie et 3 compagnons, Lucie mise sur la proximité. Le format est volontairement restreint, artisanal. Elle est au quotidien avec ses collaborateurs. Elle observe, conseille, encourage. Elle croit à l'autonomie, au droit à l’essai, à la progression collective. Chez elle, on apprend le métier autant qu’une manière d’être.
Dans ce cadre exigeant mais humain, elle sait qu’il faut aussi revoir les manières de présenter le savoir-faire. Très vite, elle imagine un lieu de rencontre client. Avec Tiphany Lair, designer d’intérieur et fondatrice de TL Création, elle co-construit un showroom partagé à Ernée. Une vitrine vivante où les clients voient leur projet prendre forme : maquettes, 3D, matériaux à manipuler. L’aménagement devient une expérience partagée, où chacun peut s’approprier les choix, les volumes, les matières. Cette complémentarité, Lucie la cultive. Elle le dit avec conviction : « J’aime les projets qui racontent quelque chose, qui naissent d’un besoin concret, d’une envie sincère. Il faut que ce soit beau, oui, mais surtout juste, pensé pour durer, au service de la vie quotidienne. »
Au quotidien, Lucie ne quitte pas le terrain. Elle visite les chantiers, suit les clients, échange avec les fournisseurs. Elle reste au contact du concret. Dans un rayon de 30 km autour d’Ernée, la Menuiserie Fougerais est connue pour sa réactivité. Mais ce qui marque encore davantage, c’est la qualité d’écoute, rare dans le secteur. Lucie ne vend pas un produit : elle propose une solution sur mesure, une réponse ajustée à une situation, une manière d’améliorer un quotidien. C’est ce qui l’anime.
Cette exigence, elle l’applique aussi à sa manière de diriger. Elle avance avec clarté. Droite dans ses choix, parfois abrupte dans ses mots, mais toujours dans une logique de dialogue. « Je suis cash, mais juste. Ce que j’attends de mes gars, je le fais aussi. Et j’apprends tous les jours. » Elle connaît la pression, la charge mentale d’un chantier, les imprévus qui bousculent. Elle apprend à déléguer, à faire confiance, à poser un cadre qui sécurise sans enfermer. Car au fond, son rôle n’est pas de tout contrôler, mais de créer les bonnes conditions pour que chacun puisse bien travailler.
Aujourd’hui, la Menuiserie Fougerais propose une gamme complète de prestations, toutes pensées sur mesure, avec le même soin du détail et la même exigence. Escaliers, agencements, menuiseries extérieures, isolation, cloison sèche, fermetures, lambris, sols et murs : chaque projet est façonné selon les envies, les contraintes, le style de vie du client. « À vous de choisir ce qui vous ressemble, nous, on s’occupe du reste », résume Lucie avec le sourire.
Au sein de la menuiserie Fougerais, chaque plan, chaque découpe, chaque assemblage est le reflet d’une intention. Rien n’est standardisé. Tout est conçu pour durer, pour s’insérer dans la vie des gens. On y trouve de l’artisanat, mais aussi de l’écoute, du soin, de la conscience. Et plus encore : une certaine idée de ce que peut être un métier quand on y met du coeur, de l’exigence, et l’envie de bien faire. Car derrière chaque projet réalisé, il y a une démarche, une présence, une volonté de créer du juste et du durable, sans jamais perdre le fil humain. C’est sans doute cela, la vraie signature de Lucie.
Quel a été votre premier contact avec Initiative Mayenne ?
Lucie FOUGERAIS : “Mon premier contact avec Initiative Mayenne remonte à l’époque où je commençais à envisager sérieusement la reprise de l’entreprise. J’avais besoin d’un regard extérieur, bienveillant mais lucide, pour m’aider à structurer mon projet. J’ai tout de suite senti que ce n’était pas qu’une aide financière : c’était un vrai accompagnement humain, avec des échanges concrets, des conseils adaptés, et surtout une écoute. Ça m’a aidée à me sentir légitime, à oser avancer avec plus de clarté.”
Quel est votre enjeu de demain ?
Lucie FOUGERAIS : “Mon enjeu aujourd’hui, c’est de continuer à faire grandir l’entreprise sans perdre son âme. Je veux structurer davantage, poser des bases solides pour que l’équipe puisse évoluer, se former, s’épanouir. En parallèle, j’aimerais développer de nouvelles collaborations locales, peut-être élargir notre champ d’intervention, mais toujours dans le respect de ce qui nous définit : la proximité, la qualité, l’engagement. Et à plus long terme, j’aimerais transmettre à mon tour : ouvrir des portes, notamment aux jeunes filles qui se cherchent une place dans des métiers encore trop fermés.”
Quel est votre état d’esprit ?
Lucie FOUGERAIS : “Je me sens à la fois ancrée et en mouvement. J’avance avec lucidité : je connais les contraintes du quotidien, les responsabilités, les imprévus. Mais je garde cette envie intacte de faire bien, de faire juste. J’apprends tous les jours, et je m’entoure de gens qui m’aident à progresser. Mon état d’esprit ? Exigeant mais serein. Je crois profondément que quand on agit avec sincérité, avec constance, les choses prennent forme. Comme un bon assemblage, ça finit par tenir.”
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